Vu sur sur le blog de Versac ce clip de l'UMP (c'est le premier).
Un désastre, pas même un champ de ruines. Ces dernières possèdent leur mythologie. Diderot disait des ruines qu'elles apprenaient à l'homme à se résigner à sa fin. Pour Chateaubriand, l'attrait que nous éprouvons pour elles tient à la fragilité de notre nature, à une conformité secrète entre ces monuments détruits et la rapidité de notre expérience. La ruine est une trace, un souvenir.



Dans ce clip, plus aucune trace : juste le vide. Les images ne renvoient qu'à d'autres images publicitaires, la boucle est bouclée, le réel a finit par disparaître. De quel pays s'agit-il ? Qui sont ces gens ? Qu'est ce qu'un après qui ne se conçoit plus par rapport à un avant ? Qu'est ce qu'un monde non ancré ? Qu'est ce qu'une politique sans polis ? Nul ne peut le dire.
Bienvenue au pays des Télétubbies (1).

Comment construire une image ? Un petit détour par la littérature peut nous y aider.
Je découvre Colette, et lis dans La Vagabonde:

Ecrire ! pouvoir écrire! cela signifie la longue rêverie devant la feuille blanche, le grifonnage inconscient, les jeux de la plume qui tourne en rond autour d'une tache d'encre, qui mordille le mot imparfait, le griffe, le hérisse de fléchettes, l'orne d'antennes, de pattes, jusqu'à ce qu'il perde sa figure lisible de mot, mué en insecte fantastique, envolé en papillon-fée...

On comprend alors que pour décrire la rue dans laquelle vit son héroine, Colette écrive :

Sous le gaz verdâtre, ma rue, à cette heure, est un gachis crémeux, praliné, marron moka et jaune caramel, un dessert éboulé, fondu, où surnage le nougat des moellons.

Au vide, on préfèrera donc le plein - fut-il le trop plein - et face à l'éternel présent, qu'il nous soit permis de choisir le temps de la rêverie, du souvenir et de la présence. Le temps de l'incarnation.

(1) Je ne parle même pas de l'absence d'un montage digne de ce nom (faut-il qu'il y est des images à confronter), ni de l'indigence du texte dont il faudrait d'ailleurs rapprocher la pauvreté stylistique avec celle des poèmes (!) de ce jeune homme dont on nous dit du bien un peu partout.