Ruines circulaires

Le Zèbre est peut-être de tous les animaux quadrupèdes le mieux fait et le plus élégamment vêtu.

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jeudi 27 juillet 2006

Temps.

Je veux bien que les fortes chaleurs ne soient guère favorables à l'effort, mais j'ai comme l'impression que l'on assiste ces derniers temps à une sorte de gagatisation des esprits.

Passez 2 à 3 heures dans un endroit frais : cinéma, bibliothèque, supermarché...la vérité d'une époque se cache dans ce type de détail.

Le temps se radoucissant, on pourra écouter avec profit J.C Casanova à propos de l'uchronie (c'est une des marottes de la maison).
Celui qui pratique l’uchronie, celui qui recherche dans tous les événements politiques quelles auraient pu être les autres décisions, les autres suites, les autres conséquences, insiste à sa façon sur la liberté et sur la contingence, et il prépare ainsi son esprit à ce qui est en définitif propre à la politique : la décision et l’incertitude.

mercredi 26 juillet 2006

Voyage.


Abdullah frères

Il fait toujours aussi chaud. A défaut de voyager, je lis et relie :

Arrivée.

Ainsi un voyageur arrivé par un beau temps au bord de la Méditerranée, incertain de l’existence des pays qu’il vient de quitter, laisse éblouir sa vue, plutôt qu’il ne leur jette des regards, par les rayons qu’émet vers lui l’azur lumineux et résistant des eaux.
Proust - Du coté de chez Swann.

J’ai fait à Keneh quelque chose de convenable et qui, je l’espère, obtiendra ton approbation. Nous avions mis pied à terre pour faire des provisions, et nous marchions tranquillement dans les bazars, le nez en l’air, respirant l’odeur de santal qui circulait autour de nous, quand, au détour d’une rue, voilà tout à coup que nous tombons dans le quartier des garces. Figure-toi, ami, cinq ou six rues courbes avec des maisons hautes de 4 pieds environ, bâties de limon gris desséché. Sur les portes, des femmes debout, ou se tenant assises sur des nattes. Les négresses avaient des robes bleu ciel, d’autres étaient en jaune, en blanc, en rouge, - larges vêtements qui flottent au vent chaud. Des senteurs d’épices avec tout cela ; et sur leurs gorges découvertes de longs colliers de piastres d’or, qui font que, lorsqu’elles se remuent, ça claque comme des charrettes. Elles vous appellent avec des voix traînantes : "Cawadja, Cawadja" ; leurs dents blanches luisent sous leurs lèvres rouges et noires ; leurs yeux d’étain roulent comme des roues qui tournent. - Je me suis promené en ces lieux et repromené, leur donnant à toutes des batchis, me faisant appeler et raccrocher ; elles me prenaient à bras le corps et voulaient m’entraîner dans leurs maisons... Mets du soleil par là-dessus.
Flaubert - Lettre à Louis Bouilhet (13 mars 1850).

Départ.

Eh bien ! je n'ai pas baisé (le jeune Du Camp ne fit pas ainsi), exprès, par parti pris, afin de garder la mélancolie de ce tableau et faire qu’il restât plus profondément en moi. Aussi je suis parti avec un grand éblouissement, et que j’ai gardé. Il n’y a rien de plus beau que ces femmes vous appelant. Si j’eusse baisé, une autre image serait venue par-dessus celle-là et en aurait atténué la splendeur.
Flaubert - Lettre à Louis Bouilhet (13 mars 1850)

Peut-être aussi Swann attachait-il sur ce visage d’Odette non encore possédée, ni même encore embrassée par lui, qu’il voyait pour la dernière fois, ce regard avec lequel, un jour de départ, on voudrait emporter un paysage qu’on va quitter pour toujours.
Proust - Du coté de chez Swann.

On connait la suite...

dimanche 23 juillet 2006

La Tour.



Pieter Bruegel

A ce qu'on m'a raconté, dit Nanni, les maçons qui travaillent en haut de la tour fondent en larmes et s'arrachent les cheveux si une brique vient à tomber, parce qu'il faudra quatre mois pour la remplacer, mais nul ne se soucie de ce qu'un homme trouve la mort dans une chute. C'est vrai?
Ted Chiang - La Tour de Babylone - Denoël • Lunes d'encre, avril 2006

mercredi 19 juillet 2006

Bang Bang



Nancy Sinatra

Trop chaud...
Un peu de douceur...encore que...he didn't take the time to lie...

On peut également lire ceci qui est de circonstance :
PHENISTONE ROAD, CLAPHAM,
August 20th, 190—.
I have had what I believe to be the most remarkable day in my life, and while the events are still fresh in my mind, I wish to put them down on paper as clearly as possible.
La suite de cette nouvelle de W.F.Harvey (1885 -1937) - Chaleur d'Août - est ici.

samedi 15 juillet 2006

La frontière.


Lu dans la constellation Suel :
Entre bêtise et progrès, les conducteurs de « quads » ont aboli la frontière.

J'ai pensé alors, j'en parlais avec S*** il y a quelque temps, à ces petits «quads» électriques qu'offrent certains parents (toutes les classes sociales sont touchées) à leurs enfants mâles de préférence. Objet, dont la laideur le dispute à la bêtise, et dont la réduction, à la manière d'un cuisinier faisant réduire une sauce pour en exprimer tout l'arôme, aboutit à un véritable concentré de vulgarité. Objet monstrueux possédant le terrifiant pouvoir, par un étrange phénomène de contamination, de transformer l'enfant, qui le chevauche, en un adulte en modèle réduit, mais sans pour autant lui ôter les caractéristiques de l'enfance, qui le transforme, en l'exhibant, en une sorte de nain, un petit nain.
S'il me fallait rapprocher un tel spectacle d'un autre, ce serait de celui de ces chimpanzés qui au cirque portent culottes ; tentative d'abolir les frontières entre l'animal et l'humain, l'enfant et l'adulte, de superposer deux mondes qui ne peuvent coïncider. Tentative démoniaque vouée à l'échec qui toujours laissera subsister un espace qui, aussi mince soit-il, laissera la place à cette sensation, aussi peu nombreux que nous soyons encore à l'éprouver dans des temps futurs, que l'on pourrait appeler l'horreur.

mercredi 12 juillet 2006

Un jour...




Diabologum/Jean Eustache.

Au bout de toutes ces années, je découvre, avec étonnement, la ressemblance entre Françoise Lebrun et Lillian Gish.
Ils avaient ça, ces acteurs : la présence
Jean-Luc Godard (à propos de Sterling Hayden et Joan Crawford dans Johnny Guitare).

samedi 8 juillet 2006

Avant match

Relevé sur le chemin du retour (ligne A du RER, changement à la Défense):

Ce qui fait de l'espérance un plaisir si intense, c'est que l'avenir, dont nous disposons à notre gré, nous apparaît en même temps sous une multitude de formes également souriantes, également possibles. Même si la plus désirée d'entre elles se réalise, il faudra faire le sacrifice des autres, et nous aurons beaucoup perdu. L'idée de l'avenir, grosse d'une infinité de possibles, est donc plus féconde que l'avenir lui-même, et c'est pourquoi l'on trouve plus de charme à l'espérance qu'à la possession, au rêve qu'à la réalité.
Henri Bergson - Essai sur les données immédiates de la conscience (1889).

jeudi 6 juillet 2006

Joie (3) ou Dédicataire.


Ce matin, j'apprends, par Le Figaro, qu'Elisabeth Craig, la dédicataire du Voyage au bout de la nuit, fut figurante dans la version muette de 1923 des Dix Commandements de Cecil B.DeMille.
Ce genre d'information, dont je conçois aisément que l'on puisse la trouver inutile mais dont on ne pourra pas nier la précision, me ravit en raison même de cette double caractéristique.

mercredi 5 juillet 2006

Joie (2)

Pour ceux que ça intéresse une discussion commencée ici et qui se poursuit .

C'est peut-être d'ailleurs ça un évènement, un phénomène qui excède toutes les critiques, aussi justes soient-elles, que l'on puisse en faire.

Ici aussi.

lundi 3 juillet 2006

Joie.

A propos de Zinedine Zidane.

Qu'est que le style? C'est faire d'un acte difficile un geste gracieux, c'est introduire un rythme dans la fatalité; C'est être courageux sans désordre, c'est donner à ce qui est necessaire l'apparence d'une liberté.
Roland Barthes - Le sport et les hommes.

Certains me répliqueront qu'il n'y a pas que le foot et Zidane dans la vie.
C'est vrai.
Il y a aussi ma fille qui vient d'avoir son baccalauréat.