Après avoir essayé, avec madame Mère, de définir le dasein, je baguenaude au Louvre.
Vais voir les Corot. Encore une fois ça ne se lève pas. Je vois bien ce qu'il veut faire, la gradation des tons etc...mais rien à faire cette peinture m'ennuie.
Petit détour par les Poussin. Suis finalement beaucoup plus sensible au caractère factice, à la fausseté des ciels de Poussin. Il ya chez Poussin comme un détachement, mais un détachement qui ne déboucherait pas sur de l'aigreur, qui en fait un moraliste.

Dans la préface à son Anthologie du portrait, Cioran, citant les Mémoires de Mme de Genlis sur le XVIIIème siécle, raconte l'historiette suivante:
La maréchale de Luxembourg s'amuse à feuilleter des livres d'heures.
Tout à coup elle s'arrêta sur deux ou trois prières particulières qui lui parurent du plus mauvais goût et dont en effet les expressions étaient bizarres.
Cioran y voit le signe d'une époque à son apogée et par conséquent à bout de souffle. Pour lui, peu importe que des prières soient de bon ou de mauvais goût, il importe qu'elles soient vraies. Il conclut ce siècle n'aimait et ne cultivait que l'exquis. La suite de l'Histoire est connue.
En écoutant un représentant de nos élites (un ex-premier ministre) parler de un miyon de personnes, je n'ai pu m'empêcher de penser que nous avions perdu et les prières et le goût.

Au Louvre le beau pastel de La Tour représentant Madame de Pompadour. Elle dans toute sa splendeur entourée, entre autres, de l'Esprit des Lois de Montesquieu, d'une planche de l'Encyclopédie. Entourée des symboles mêmes qui entraineront la chute de l'Ancien régime. La simple vue de ce pastel vous fait immédiatement douter d'une vision "marxiste" de l'histoire.

A la radio, la nuit, une émission consacrée à Milosz (1877-1939). Né en Biélorussie (l'actuelle Lithuanie) il écrivit en français. A son propos un commentateur nous précise (je cite de mémoire): C'etait un grand européen, il lisait de la littérature française, allemande, anglaise...
Et là, je me suis demandé si ce n'était pas le meilleure argument contre le projet de constitution, ou plus précisemment contre la vision fédéraliste qui le sous tend. Il ne lisait pas de littérature européenne mais de la littérature allemande, anglaise.
Je crains que l'on n'oublie un peu, ce que on a longtemps appelé, le génie des peuples.