Ruines circulaires - Commentaires
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fr2012-10-14T16:06:14+02:00daily12012-10-14T16:06:14+02:00Bile noire. - Anaximandrake
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2012-10-14T16:06:14+02:00AnaximandrakeOn finissait par désespérer... Merci pour ce très beau texte sur Godard, ce génie franco-suisse....On finissait par désespérer... Merci pour ce très beau texte sur Godard, ce génie franco-suisse.]]>Bile noire. - alph
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2012-10-14T13:59:31+02:00alphLa musique :Spiegel Im Spiegel de Arvo Pärt.
J'ai trouvé ce commentaire de Nicole Brenez :
Dans le noir du temps porte à son comble le principe romantique du fragment arraché. L’ambition de créer au nom de ce qui manque, ici, prend des proportions cosmiques : « Quand je regarde le ciel entre...La musique :Spiegel Im Spiegel de Arvo Pärt.
J'ai trouvé ce commentaire de Nicole Brenez :
Dans le noir du temps porte à son comble le principe romantique du fragment arraché. L’ambition de créer au nom de ce qui manque, ici, prend des proportions cosmiques : « Quand je regarde le ciel entre les étoiles, je ne peux voir que ce qui a disparu », énonce la voix de Godard. Mais la formule soudain actualise sa dimension historique, au moment où la bande-son installe le silence et où des images des cadavres des camps d’extermination surgissent : on comprend dès lors que, pour Godard, il s’agit d’oeuvrer au nom de l’imprescriptible. Dans le noir du temps, qui inaugure le travail de Godard sur la paix, représente un retour à Kant, en ce que le film se trouve véritablement conçu d’un point de vue « cosmopolitique » — retour qui prendra sa pleine mesure dans Notre musique (2004).
La fusion romantique entre art et éthique redevient alors un dépassement, celui de l’art en morale. C’est la pensée de Pascal que cite la voix de Godard : « Tous les corps ensemble et tous les esprits ensemble et toutes leurs productions ne valent pas le moindre mouvement de charité. Cela est d’un ordre infiniment plus élevé. » Or, une telle pensée ne conduit aucunement à relativiser ce qui est mais, au contraire, à peupler le monde de ce qui devrait être : la justice, s’il fallait le résumer en un mot. On doit à Simone Weil (1999, p. 726) une transcription moderne de la pensée pascalienne : « […] la charité du prochain, étant constituée par l’attention créatrice, est analogue au génie. L’attention créatrice consiste à faire réellement attention à ce qui n’existe pas. »
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Plastiquement, cette pensée de l’inactuel entraîne à systématiser les formes de l’intermittence (ici traitée en vacillement), et à considérer l’image, aussi magistrale soit-elle, au titre du fragile éclat de ce qui reste inaccompli. Le rôle du montage consiste donc à laisser des seuils entrebâillés partout pour laisser entrer ce qui a disparu ; décrire la présence comme lueur fugitive (arrachée non pas à la mort, mais à l’histoire effective comme histoire de l’injustice, du recouvrement, du celé) ; et hanter l’effectivité de potentialités contradictoires. Dans le noir du temps travaille à compléter les fonctions d’enregistrement et de reproduction propres au cinéma par ses puissances inverses d’effacement et d’émancipation. La proposition, fondamentale, consiste à subordonner le cinéma en tant que dispositif technique (l’enregistrement) au cinéma comme dispositif éthique (l’attention créatrice). Attention mélancolique à ce qui n’est plus là, attention fervente à ce qui pourrait être et qu’il convient de faire advenir dans les formes mêmes de la défaillance, attention tragique à ce qui n’adviendra pas.
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Autrement dit, le cinéma, ici, devient le montage des limites de l’analogie. Peut-être n’aura-t-il jamais été plus profondément critique, selon tous les sens dont la tradition ouverte par Kant a investi ce terme. L’entreprise godardienne accomplit ainsi les « deux articles » programmatiques que Schlegel assignait à la philosophie : « 1) Il faut développer en chaque homme la nostalgie de l’infini. 2) L’apparence du fini doit être anéantie ; pour ce faire, tout savoir doit être placé dans un état révolutionnaire » (dans Thouard 2002, p. 177 — c’est Schlegel qui souligne).
( commentaire complet : www.erudit.org/revue/cine... )]]>Bile noire. - Anaximandrake
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2012-10-10T20:37:45+02:00AnaximandrakeYes indeed : tinyurl.com/8n7x762
Kudos !
Et si l'on me permet encore un excursus philosophique... Comme aurait pu dire (l'a-t-il dit ? sont-ils un ?) Borges (Cf. par exemple la fin des 'Théologiens') :
"Joignez ce qui est complet et ce qui ne l’est pas, ce qui concorde et ce qui...Yes indeed : tinyurl.com/8n7x762
Kudos !
Et si l'on me permet encore un excursus philosophique... Comme aurait pu dire (l'a-t-il dit ? sont-ils un ?) Borges (Cf. par exemple la fin des 'Théologiens') :
"Joignez ce qui est complet et ce qui ne l’est pas, ce qui concorde et ce qui discorde, ce qui est en harmonie et en désaccord ; de toutes choses une et d’une, toutes choses." (une traduction possible du fragment 10 d'Héraclite, cf. Pseudo-Aristote, Traité du Monde, 5. 396b7)
Bien sûr : du même Pseudo-Aristote (lu par Burton lu par Borges), 'L'homme de génie et la mélancolie'. Et d'autres doxographies sur Héraclite... Mais sachons nous méfier des légendes noires (voir aussi les calomnies au sujet de Lucrèce ou Spinoza).
Mieux :
"Pour Héraclite, le miel est à a fois amer et doux, et le monde est à lui-même une coupe à mélange qui doit être constamment agitée. Tout devenir naît de la lutte des contraires. Les qualités définies qui nous semblent durables expriment que la suprématie momentanée de l'un des combattants, mais la lutte n'en continue pas moins, le combat se poursuit éternellement. C'est en fonction de ce combat que tout ce qui se produit advient, et c'est précisément ce combat qui révèle la justice éternelle. C'est une conception admirable, puisée à la source la plus pure de la civilisation grecque, et pour laquelle la lutte est le règne perpétuel d'une justice cohérente et sévère, liée à des lois éternelles. Seul un Grec était en mesure d'inventer une telle conception pour en faire le fondement d'une cosmodicée. C'est la bonne Eris d'Hésiode érigée en principe universel, c'est la conception de la joute propre à l'homme grec et à la cité grecque. Cette conception prend sa source dans les gymnases et les palestres, dans les joutes artistiques, dans les luttes des partis politiques et des cités, elle est portée au plus haut degré d'universalité, au point qu'elle est alors l’élément où se meut l'axe du monde." (Nietzsche, La philosophie à l'époque tragique des Grecs)
Et:
"Tel est le cœur de l'idée grecque de la joute : elle exècre la suprématie d'un seul et redoute ses dangers ; comme moyen de protection contre le génie, elle exige... un autre génie." (Nietzsche, La joute chez Homère)
Bref, Héraclite (ou Lucrèce ou Spinoza) comme 'protos metaxu ison' (primum inter pares). La si démocratique Suisse est-elle donc trop petite pour l'envergure d'un Starobinski ou d'un Rousseau ?
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