A Juliette C.

Je me suis remis au badminton après m'en être abstenu pendant des années. Je ne fus pas cependant surpris lorsque la dédicataire de ce billet nota que son professeur de badminton lui fit une remarque selon laquelle elle jouait comme si elle était à la plage. C'est là une antienne que j'avais maintes fois entendues et pas plus tard que lors de ma séance de reprise.
Ce lieu-commun badmintonien, comme la plupart des lieux-communs (autre lieu-commun) est aussi le signe d'une vérité.
A l'inverse des jeux de plage du type raquette, le badminton (dans sa pratique sportive) ne repose pas sur la coopération des adversaires. Jouer aux raquettes sur la plage, c'est chercher à prolonger l'échange, ou plutôt c'est chercher à mettre son partenaire suffisamment en déséquilibre afin qu'il éprouve une certaine difficulté à retourner la balle. Suffisamment mais pas trop. Un joueur qui smasherait à tout va ou ne ferait des lobes se verrait rapidement écarté.
On retrouve le même principe, certes dans une moindre mesure, dans la pratique du tennis lorsqu'il est pratiqué sur le mode "on fait des balles". Il s'agit au fond dans les deux cas de valoriser son adversaire.
Rien de tel au badminton. Les particularités du volant, principalement l'absence de rebond, font que l'échange pourrait durer facilement fort longtemps et le jeu devenir assez lénifiant. Ce dernier ne prend alors tout son sens que lorsque le volant est mis hors de portée de l'adversaire et ce même à l'entrainement. Rare sport qui s'il est pratiqué sérieusement ne peut se jouer plein-air, le badminton ne se conçoit que sous le mode du rapport antagonique. Le badminton ne voit en l'autre qu'un ennemi.
On ne "fait pas de volant" au badminton ou pour reprendre une belle formule de Juliette C., on n'y joue pas avec son âme.