Hier soir j'ai ressorti, je ne sais trop pourquoi, La Guerre et la paix, la vieille édition des années 60 du Livre de poche avec la préface de Brice Parain.
Tolstoï a aimé son enfance. C'est peut-être une condition pour qu'ensuite on puisse vraiment se sentir d'accord avec la vie. On dirait qu'il faut y avoir cru à l'âge où l'on croit. Sinon la confiance ne peut plus être aussi pleine.
Je crois avoir aimé mon enfance.
Longtemps je ne suis guère allé plus loin que les premiers chapitres du roman de Tolstoï non que je n'aimasse pas cela mais pour des raisons strictement opposées.
Je ne pouvais m'empêcher de m'arrêter et de relire le portrait du prince Vassili (et ce n'est là qu'un exemple). Sa voix où sous la politesse et la sympathie perçaient l'indifférence et même l'ironie. La façon qu'il avait de s'exprimer avec indolence comme un acteur qui récite un rôle connu depuis longtemps. Sa faculté de comprendre à demi-mot : Le Prince Vassili ne répondit pas, quoique avec la vivacité d'esprit et la mémoire des gens du monde il indiquât d'un signe de tête qu'il avait pris note de ces indications. Ce geste que le narrateur lui même ne peut que trouver curieux, alors qu'il remercie sa chère Annette: Écoutez chère Anette dit le prince en prenant soudain la main de son interlocutrice et en la tirant, Dieu sait pourquoi, vers le bas.
Ce qui m'arrêtait (j'ai tout de même fini par lire le roman dans son intégralité) c'était, je le pense, cette trop grande présence des personnages. Ce sentiment d'étouffement que je ressentais, il avait pour origine un trop plein de vie.

Hier soir je n'ai lu que le premier chapitre