J-J.G. jeune critique de cinéma ne jure que par la modernité du réalisateur Tony Scott. Je me dois d'avouer que je ne comprends pas très bien ce que recouvre ce mot. Ou plutôt à l'heure où le mot d'ordre rimbaldien - il faut absolument être moderne. - est devenu un impératif catégorique, où tout est moderne, de la politique au premier gadget venu, en quoi peut consister une modernité qui ne se construirait pas contre un ordre ancien ou existant puisque c'est là sa définition même.
A moins que par modernité, il ne faille entendre ce qui est dans l'air du temps, qui est le reflet du monde qui nous entoure. Ce qui n'est qu'une autre façon de dire, pour reprendre l'exemple cité, que Tony Scott est un cinéaste voué inexorablement à être démodé.

Un peu pour comprendre l'intérêt que peuvent y trouver certains de mes amis, je jette un coup d'œil à la série de Harry Potter. Quelle ne fut pas ma surprise de lire dans les premières phrases du tome 1 la phrase suivante : When Mr. and Mrs. Dursley woke up on the dull, gray Tuesday our story starts... Pourquoi diable cette intervention du narrateur à l'intérieur du texte ? Cette mise à distance par laquelle il pense échapper à l'accusation d'arbitraire (ceci n'est qu'une histoire, une histoire inventée, nôtre histoire) alors même que le genre, qui plus est destiné à de jeunes lecteurs, repose sur la croyance. Mais il est vrai que la modernité construite en opposition à la conception romanesque du XIXème siècle, retrouvant les leçons d'un Cervantès ou d'un Sterne, nous a appris à ne plus croire. Il n'en reste pas moins que ce qui peut apparaître comme un manquement à la logique interne du récit, manquement qui n'a guère eu de conséquence, ou pour le dire autrement la perte de la bonne distance, renvoie au pire à une certaine trivialité et au mieux à la fébrilité de la romancière (à la décharge de J.K. Rowling, je ne crois pas avoir retrouvé de procédés de ce type dans les ouvrages suivants).

Mon personnage n'écrit pas. Ce que vous lisez, c'est de la pensée en action. A aucun moment, le personnage n'a conscience d'écrire, ou plutôt d'être écrit.
Marc-Edouard Nabe.
Pour le coup on est en pleine illusion et force est de constater que les leçons du Don Quichotte ont été perdues.