A un jeune homme talentueux qui, lors d'un bref échange à propos de Jean Luc Godard, écrivait : C'est un funèbre dont je me méfie absolument.


(...) il aima, mortes et gisantes, des institutions qu'il avaient fuies jusqu'au désert, quand elles florissaient. Il leur donna, non point des pleurs mais des pages si grandement et si pathétiquement éplorées que leur son éveilla, par la suite, ses propres larmes.
Il les versait de bonne foi. Cette sincérité allait même jusqu'à l'atroce. Cet artiste mit aux concert de ses flûtes funèbres une condition secrète, mais invariable : il exigeait que sa plainte fût soutenue, sa tristesse nourrie de solides calamités, de malheurs consommés et définitifs, et de chutes sans espoir de relèvement. Sa sympathie, son éloquence se détournaient des infortunes incomplètes. Il fallait que son sujet fût frappé au coeur. Mais qu'une des victimes, roulées, cousues, chantées par lui dans le "linceul de pourpre", fît quelque mouvement, ce n'était plus de jeu ; ressuscitant, elles le désobligeaient pour toujours. (...)
Loin de rien conserver, il fit au besoin des dégâts, afin de se donner de plus sûrs motifs de regrets. En toutes choses, il ne vit que leur force de l'émouvoir, c'est à dire lui-même. (...) Il se soumettait l'univers.
Charles Maurras - Trois idées politiques - Chateaubriand ou l'anarchie.

On peut ne pas être complètement d'accord, et penser que les Histoire(s) seront les Mémoires du siècle passé, mais force est de constater qu'il y a là quelque chose de vrai.