A Jean Sébastien.

On pourrait alors dire que ce qui manque au cinéma français, c'est cette capacité balzacienne de représenter le monde. Et je pense tout particulièrement à ces quelques lignes écrites par Alain dans son Balzac
Ce qui étonne dans Balzac, et ce qu'il fait qu'il règne absolument sur les romanciers, c'est que la pensée n'y prend jamais la forme triomphante d'une idée. J'oserais dire que toute pensée en Balzac reste bête, même la sienne (...). Mais on ne trouvera pas dans toute l'oeuvre un seul discours qui ne porte la marque de l'homme par une confusion respectée (...). Et par là j'aperçois que son génie consiste à s'installer dans le médiocre, et à le rendre sublime sans le changer. Cette autre dimension des pensées en profondeur, sans aucune clarté extérieure, est remarquable aussi dans Skakespeare. On n'est pas accoutumé à la trouver dans le roman, ou l'analyse ne cesse d'exténuer la nature. En Balzac il me semble que l'analyse épaissit la nature.(1)
Ce qui semble s'être perdue entre la fainéantise méprisante de TF1(2) et l'intelligence (guillemets de rigueur) d'un film plombé comme La Blessure c'est, peut-être donc, cette bêtise. Bêtise qui pourrait donner à voir la part d'irréductible qui existe chez l'autre. Car en raison même d'un discours commun sur la différence, ce que filme le cinéma francais c'est le même, puisque au-delà de nos différences nous sommes tous semblables. A quoi bon alors représenter ce qui n'est pas moi puisque le monde c'est moi. Exténuer la nature au point de la réduire à un simple point, la faire disparaître pour ne pas avoir à se confronter avec. Au fond avec ses petits bourgeois pré-retraités-partouzards le cinéma français est un cinéma de lâches.(3)

Bien à toi.





(1) Ce qui fait d'ailleurs de toute comparaison entre un Houellebecq et Balzac un absolu contresens.
(2) Dans la série Dolmen, l'héroïne doit absolument contacter un quidam quelconque. Elle prend son portable, constate que la batterie est à plat. Que faire? Son adjoint sort son téléphone, lui propose de l'utiliser. Et il marche !!! Soit cette scène dont l'économie narrative est pour le moins discutable n'a pas été relue et l'on est dans la fainéantise. Ou alors il n'a pas été jugé utile de la relire et l'on est dans le mépris.
3) Et puisqu'il faut afficher ses goûts et prendre parti, on avancera trois noms, parmi les plus récents, qui échappent à ce qualificatif. Un mort et deux vivants :
Maurice Pialat. Jean François Stévenin. Et pour deux ou trois films, Catherine Breillat.